Grandeur et misère d’un poète-journaliste : les Illusions perdues sont plus actuelles qu’il n’y paraît. Avec son élégant minimalisme, Pauline Bayle adapte le foisonnant roman de Balzac au théâtre, libérant l’énergie communicative des comédiens qui s’empare du plateau.

Lorsque Lucien de Rubempré débarque à Paris, des sonnets plein les poches et des rêves plein la tête, il ne sait pas encore que c’est sur un ring où tous les coups sont permis qu’il entre en réalité. Déchiré entre ses aspirations littéraires, son ambition sociale et sa soif de jouir du présent, il se lance dans un douloureux numéro d’équilibriste. Après avoir sublimé Iliade et Odyssée dans un souffle de joie épique, Pauline Bayle s’attaque à un autre monument de la littérature, réaliste cette fois. Soignant l’épure pour que les images qu’elle crée n’en soient que plus saisissantes, elle confie à cinq interprètes à l’aise dans tous les registres le soin d’endosser tous les rôles. Sans rien sacrifier de la satire sociale, des atermoiements existentiels ou des analyses esthétiques de Balzac, la metteuse en scène touche au plus juste et fait briller la langue, aussi fleurie qu’acerbe, du grand romancier du XIXe siècle.