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Un cimetière antique sous la place des Carmes

08/07/2019 Dynamisme culturel

Avant le réaménagement total de la place des Carmes, à Clermont-Ferrand, la Métropole finance d’importantes fouilles archéologiques pour sauver notre patrimoine de l’oubli. Sur ce chantier qui touche à sa fin, la société Archeodunum a fait d’étonnantes découvertes, dont un espace qui s’apparente à un espace funéraire gallo-romain, avec de nombreuses sépultures de bébés.

On est loin, très loin, des aventures périlleuses et exotiques de Lara Croft et de toute la mythologie qui s’y rapporte… Sous un soleil de plomb, place des Carmes, à Clermont-Ferrand, Marco Zabeo et son équipe y vont à la sueur de leur front pour révéler, avec patience et minutie, les trésors sur lesquels nous marchons depuis des siècles. En quatre mois, les archéologues de la société Archéodunum ont sondé en profondeur ce terrain situé « aux portes de la ville antique d’Augustonemetum », le nom gallo-romain de Clermont. Un site aux mille merveilles qui sera bientôt recouvert par une place entièrement métamorphosée.

Ces travaux d’envergure, lancés par la Métropole et Michelin, devraient courir jusqu’à 2021. Mais avant que ne débute réellement la refonte de la place, la collectivité finance un vaste chantier d’archéologie préventive qui prendra fin cet été. « Ce travail, réalisé dans le cadre d’un marché public, consiste à intervenir en amont des projets d’aménagements et à financer, par l’étude, la sauvegarde du patrimoine qui va être recouvert », explique François Meylan, archéologue responsable de la communication chez Archéodunum.

Sépultures et villa périurbaine

Avant qu’une nouvelle page se tourne place des Carmes, l’équipe de cette société née en Suisse a donc la précieuse mission de faire parler l’Histoire. Sur les prescriptions du service régional de l’Archéologie, les archéologues investiguent depuis le mois d’avril deux zones bien distinctes, aux pieds du siège historique de Michelin.

Ici, sous les différentes strates, ils étudient « deux occupations », à deux périodes différentes : l’époque Gallo-Romaine et le Moyen-Âge (*). C’est dire l’étendue des savoirs enfouis sous nos pieds ! Sur la première zone, l’équipe de Marco Zabeo a découvert ce qui pourrait s’apparenter à « un bâtiment de standing moyen » avec cave, type « villa périurbaine », et toutes sortes de vestiges domestiques, entassés dans des grandes fosses. « Des céramiques, des petits biberons, qui nous renseignent sur la vie quotidienne de l’époque », explique le responsable des fouilles.

À quelques encablures de cet ancien bâtiment, quatre puits et au moins trois sépultures ont également été mis au jour. Des tombes « assez particulières » car « les corps ont été enterrés sans aucun soin », ce qui –selon l’anthropologue présent sur le chantier– « pourrait laisser penser à des individus malades. »

 

"Des bébés dans un état de conservation extraordinaire"

 

Rien à voir avec les mises en scène tout à fait étonnantes que Marco Zabeo et son équipe ont découvertes sur la deuxième zone de fouilles. Là, en bordure du site Michelin, les archéologues ont décelé une abside, pouvant s’apparenter à un édifice religieux ou à un espace thermal, et plusieurs sépultures –près d’une trentaine au total– qui confirment l’existence d’un espace funéraire antique à cet emplacement.

Chose plus étonnante encore, la plupart de ces tombes sont occupées par des squelettes de bébés « dans un état de conservation extraordinaire » et avec lesquels ont été enterrés des chiens. « Des exemples de chiens inhumés à proximité de bébés sont connus, mais là on est sur quelque chose d’assez inédit à cette échelle », relève Marco Zabeo qui interprète ce rituel avec beaucoup de précautions. « Le chien, meilleur ami de l’homme. Moi j’imagine bien le concept de guide ». Un guide pour accompagner le mort dans son voyage vers l’au-delà. « Il s’agit d’un cas d’étude très intéressant » pour les scientifiques qui vont pouvoir « croiser » deux disciplines, l’archéozoologie et l’anthropologie, afin de lever le voile sur ces étranges pratiques.

Ce sont maintenant les études réalisées dans l’une des bases de travail de la société Archeodunum, à Lyon, qui permettront de percer les derniers secrets de tous les vestiges prélevés aux Carmes. Après avoir manié la pelle, la truelle, le pinceau et le scalpel pendant plusieurs mois, les archéologues vont tenter, à la manière d’un enquêteur, de remonter la piste historique de leurs nombreuses trouvailles.

Un travail qui sera consigné dans « un rapport de fouilles, avant que les objets ne soient remis à l’État », détaille François Meylan. Ils devraient également être valorisés sur place, à travers une exposition et une conférence grand public pour témoigner des coutumes de nos ancêtres gaulois et de ce qu’elles nous apprennent sur nos pratiques d’aujourd’hui.

(*) Les archéologues ont également mis au jour un bâtiment plus moderne, sous le pont de la place des Carmes. «Un réseau souterrain avec des portes condamnées qui date probablement du XXe siècle», selon Marco Zabeo.

 

Les vestiges de Rabanesse exposés au Bargoin
Pendant deux ans, le musée Bargoin expose le résultat des fouilles menées en 2016 autour de la rue de Rabanesse, à Clermont-Ferrand, dans une salle du parcours permanent des collections archéologiques. Le site avait en effet livré des données inédites sur les occupations successives, en particulier concernant la période romaine et la fin de la Préhistoire (Néolithique), époque illustrée par la présence d’une tombe âgée de près de 6 000 ans.