Lorsque Frédéric MOULIN revient sur la genèse de ce projet :

Lyon. Septembre 1979. J’ai neuf ans. J’apprends la mort de mon grand-père que je n’ai jamais rencontré. Mon père se rend en Moselle où mon grand-père était retourné vivre. Il ramène une énorme boîte noire en carton bouilli qui est immédiatement remisée, isolée, cachée. On décrète que cette boîte ne sera pas ouverte avant la mort de ma grand-mère car elle peut contenir des choses de nature à rappeler un passé douloureux.

Lyon. Janvier 2018. Ma grand-mère est morte. Le souvenir de la boîte noire me revient. Où est la boîte ? Elle sommeille dans un garage, abandonnée… J’oblige mon père à l’ouvrir. Je découvre enfin l’histoire de Louis Moulin. Au moment de l’exode, mon arrière grand-père accompagné de sa femme et de son fils, tous deux maîtres-imprimeurs, se réfugient à Lyon et achètent, en mai 1940, une imprimerie au 46 rue de l’Université. À l’intérieur, un dossier gris, en parfait état. Je découvre alors une centaine de lettres manuscrites et dactylographiées. Un autre dossier comprend livrets de famille, passeports, photos, cartes d’identité, actes de naissance…Tous ces documents originaux couvrent la période 1890-1942. Je commence à les étudier avec soin. Je suis fasciné.

« À rendre à M. Morgenstern en cas de demande » est le portrait de Léopold Morgenstern, un réfugié traqué, avant et pendant la Seconde Guerre Mondiale. C’est la description d’un monde où il faut sans cesse prouver qu’on est en règle pour ne pas être exclu, ostracisé, persécuté.

C’est aussi un spectacle qui vise à explorer pour soi une époque passée, perdue dans le flou indiscernable des conflits historiques. Le public aura accès aux archives, pourra les interpréter, fera ainsi sa propre expérience de reconstruction de mémoire.