Le programme que proposent Katia et Marielle Labèque suit un parcours dont elles sont des spécialistes reconnues : celui qui relie, de part et d’autre de l’Atlantique, musique française et musique américaine du XXe siècle, en allant chercher chez Debussy, Ravel ou Philip Glass comme une secrète affinité musicale faite de résonances, un sens proche du temps et de l’espace, et le goût des motifs circulaires ou concentriques. Second fil conducteur de cette soirée : une tentation certaine pour la nostalgie de l’enfance. Les six Épigraphes antiques de Debussy ressuscitent les charmes mélodiques d’une Antiquité rêvée, enfance du monde, tandis que chez Ravel, Ma mère l’Oye d’après les contes de Perrault plonge l’auditeur dans les charmes des contes de fées et la poésie des premiers âges de la vie. Mais ce sont surtout Les Enfants terribles, de Philip Glass, qui portent au plus haut cette nostalgie de l’enfance, dans ce qu’elle peut avoir de plus trouble. Arrangée pour deux pianos d’après l’opéra du même nom – lui-même inspiré de Jean Cocteau -, la pièce offre la vision plus sombre et mélancolique d’une enfance qui se sait déjà menacée, jouant et rejouant dans la répétition de ses motifs la nostalgie de l’origine et le refus du moment de grandir.